Reykjavik / Harpa Concert & Conference Centre – Henning Larsen Architects
Nom / Harpa Concert & Conference Centre Client / Austurnholn TR – East Harbour Project Ldt Architecte / Henning Larsen Architects Localisation / Reykjavik – Islande Fonctions / Salle de concert et (3) salles multifonctionnelles 29 000m2 Matériaux / Structure d’acier, revêtement en zinc, gyspe renforcé par de la fibre de verre Commission / 1er prix lors du concours en 2005 Construction / 2007-2011 (aménagement extérieur en reconstruction)
Située à la frontière entre la ville et l’océan, l’œuvre reflète ce double contexte. Les architectes ont multiplié les références au paysage islandais. Cet exercice conceptuel semble avoir porté fruit. Fiers de leur patrimoine naturel, les Islandais furent interpellés par celles-ci et ont adopté le style résolument contemporain de l’œuvre.
Fraîchement terminé, le bâtiment fût inauguré le 19 août 2011. Depuis, il attire des foules des quatre coins de l’Islande venus admirer cette œuvre qui a eu peine à voir le jour. En effet, la construction d’édifice, débuté en 2007 avec des fonds privés empruntés aux banques islandaises, s’est rapidement interrompue lors de la crise de 2008, qui a entraîné en Islande la faillite des plus importantes banques du pays. À l’hiver 2008, une triste construction inachevée se trouvait en plein cœur du centre-ville, rappelant à tous la morosité de cette déchéance financière. Plusieurs débats eurent lieu afin connaître le sort de cette enfant orphelin : poursuivre ou détruire. Telle était la question! Finalement, le gouvernement par l’implication d’une taxe spécial a pris en charge le reste de la construction du projet, soit environ 60%, doit le coût total s’élève désormais à plus de 220M$ CAD. Il est maintenant la seule et unique salle de concert de la nation digne de se nom et n’a absolument rien a envié a notre triste salle de l’OSM qui verrat le jour sous peu.
Dès mon arrivée, j’ai été surpris par la complexité formelle de cette enveloppe. Cette spectaculaire façade est l’œuvre de l’heureuse collaboration entre les architectes et l’artiste dano-islandais, Olafur Eliasson. Le résultat est étonnant et les références sont multiples. Selon certain point de vue, notamment de près et depuis le foyer vertical, l’effet semble s’inspirer des parois hexagonales des falaises en basalte que l’on retrouve dans l’arrière-pays et sur la côte. Alors que depuis la ville, nous pouvons y voir une référence au monde aquatique et notamment à la pêche qui a été longtemps une des principales industries de l’Islande. Finalement de nuit, de doux jeux de lumière semblent suggérer les spectaculaires aurores boréales qui illuminent les ciels clairs d’hiver. Bref, une conception contextuelle d’une très grande beauté de jour comme de nuit!
Deux types de façade façonnent l’expression extérieure du bâtiment. Le premier type est tridimensionnel et réfère à la formation géologique typique de basalte. Alors que la deuxième est planaire et composé à partir d’une section de la première. On y dénombre plus de 10 000 fenêtres avec plus de 1000 formes différentes.
Le complexe offre la possibilité d’accueillir une gamme d’activités à la fois très diversifiées et très spécialisées : spectacles, conférences, banquets, réception, lecture, réunions…. Les week-ends, il est pris d’assaut par les citoyens venu s’y asseoir, se rencontrer, boire, manger, magasiner, surfer, étudier, socialiser, flirter, pavaner, jouer, skater…. On s’y promène avec toute liberté. Il s’agit d’une véritable œuvre publique. Le fait que l’édifice est pourvu de plusieurs espaces libres gravitant autour des fonctions principales permet d’accueillir des activités éphémères telles que des défilés de mode, des expositions et servir bien sûr de foyer aux différents amphithéâtres. Alors qu’au rez-de-chaussée, les fonctions sont distribuées d’une manière très urbaine avec ces venelles, rues, boulevards et place publique, le tout fût conçu de manière à libérer l’ensemble de la façade afin d’y permettre de très belle vue sur le port et la ville. On s’y croirait dans une petite ville italienne avec vue sur mer! Aux étages suivants, les espaces s’en chaînent grâce une succession d’escaliers spectaculaires, longue rampe, paliers et belvédères. Cette série d’espace très ouvert et vertical nous amène davantage dans le paysage islandais. On pourrait s’y croire en pleine montagne. Ce sentiment est d’autant plus renforcé par la lumière qui y abonde et l’omniprésence de la façade largement influencée par les éléments de la nature. Cette randonnée de près d’un kilomètre culminera sous peu à un immense toit-terrasse d’où j’imagine une vue panoramique de la ville et de la mer se dévoilera. Étant donné l’emplacement privilégié qu’il offre, cet espace est toujours en construction en attente d’une réflexion. En effet, les directeurs de l’établissement sont encore en discussion à savoir à qui reviendra cet espace et/ou quelles fonctions s’y établiront.
La distribution spatiale est très souple, on gravite autour des différentes salles allègrement. Les fonctions sont organisées dans des boîtes à l’intérieur d’une enveloppe non compositionnel. Chacune de ces boîtes contient les différents amphithéâtres : Kaldalon (Cold lagoon), Nordurljos (Nordik light) et Silfurber (Silferrock). Bien que tous très polyvalente, elles servent respectivement de salle de spectacle, salle de présentation et salle de conférence. Chaque salle est munie d’une série de dispositifs permettant d’ajuster l’acoustique en fonction de l’activité, du style de musique, nombre de personnes… Finalement, la plus imposante et certainement la plus belle de toutes permet de recevoir les événements de grande envergure, spectacles populaires, l’orchestre symphonique… L’eldborg (fire city) fait référence à l’activité volcanique omniprésente sur cette île. L’extérieur de la salle est en béton foncé alors que l’intérieur est constitué de bois teint d’un rouge intense. Cette combinaison représente la lave solidifiée en son pourtour, mais en continuelle fusion à l’intérieur.
En opposition de la façade très exubérante du projet, l’intérieur surprend par sa tonalité très sombre sans néanmoins être austère. Les architectes ont marié avec succès le béton noir, l’ardoise polie, l’acier platiné dans un amalgame de gris et de noir. Le tout est souligné par l’emploie d’une seule et unique couleur signalétique le jaune safran. Seules quelques œuvres d’art islandais meublent les murs de béton brut. L’ardoise du plancher est si lisse qu’elle permet d’extraordinaires réflexions de lumière mettant ainsi en relation le plancher à la mer qui l’entoure. Sous un ciel semi ombragé, les effets de lumière sont magnifiques, et continuellement en changement. Le bâtiment semble ainsi respirer sous les pulsions solaires.
Quant à l’aménagement paysager, il tire habilement parti de sa position privilégiée avec l’eau. Il incorpore une succession de bassin qui guide les visiteurs et offre un espace tampon entre la place publique qui fait face à l’édifice et le plus important boulevard de Reykjavik.